1561 jours – Général Ancelin : 24 octobre 1916

1561 jours – Général Ancelin : 24 octobre 1916

Le jour où… Reprise du fort de Douaumont.

Dessin de Forain : sa vision de la reprise de Douaumont

Nous y sommes !

La météo n’est pas de la partie : un brouillard dense recouvre un terrain bouleversé et inondé d’une boue gluante.

10 minutes avant le déclenchement de l’attaque, le général Anselin, commandant la 214ème Brigade, est fauché par un éclat d’obus, mais, à l’heure H prévue, soit 11h40, les compagnies de 4 divisions se lancent à l’assaut entre les carrières d’Hardaumont et le bois de la Laufée. Presque toute l’infanterie est représentée : régiments d’active, de réserve, zouaves, tirailleurs, chasseurs, coloniaux.

Vers 14 h, le brouillard se lève et l’objectif apparaît, même si l’offensive ne se limite pas au fort de Douaumont ; l’intention porte aussi sur Vaux. L’entraînement sur maquette va payer car, mis à part les traditionnelles erreurs de progression et quelques petits problèmes de coordination, l’affaire se déroule comme prévue, au moins en ce qui concerne Douaumont. Pour le fort, il va se jouer l’exacte réplique de sa prise, l’occupant l’ayant en partie abandonné, craignant une explosion comme en mai.

Carte : les opérations de reprise de Douaumont et Vaux (sans succès)

Lettre de Nivelle (5 décembre 1916) : l’attestation pour le 321ème RI

Beaucoup de monde va pouvoir revendiquer d’avoir atteint le fort en premier…

L’histoire a retenu le Régiment d’Infanterie Colonial du Maroc, celui qui s’est emparé en août du village de Fleury. Dans les faits, ce sont des soldats du 321ème Régiment d’Infanterie qui coiffèrent le fort à hauteur de la tourelle de 155 mm à l’Est, mais ce sont effectivement les Marsouins du bataillon du commandant Nicolaï du RICM qui investirent le fort… avec des sapeurs du 19ème Régiment du génie.

Le mot de la fin peut revenir au chef de corps du 321ème RI, le colonel Picard :

Le Régiment Colonial du Maroc devait le 24 octobre prendre le fort ; il l’a pris : ça, c’est de l’histoire. Mais il pourra impartialement ajouter que ce sont les vieux du 321ème Régiment d’Infanterie qui, les premiers, ont grimpé sur le fort : ça aussi, c’est de l’histoire.

En tout cas, dans le JMO du 321ème Régiment d’Infanterie est jointe une note manuscrite du général Nivelle pour authentifier leur action !

Le soir, le fort est tenu et le village de Douaumont est repris ; seul le fort de Vaux n’a pu être atteint.

Parmi les nombreux héros et acteurs de la journée, un pilote, le boxeur Georges Carpentier, chargé de transmettre des messages par voie aérienne aux troupes de 1ère ligne, subira ce jour un de ses rares KO : De mon poste de pilotage, je voyais distinctement les corps des défenseurs du fort déchiquetés par les obus, tandis que nos poilus escaladaient ce qui subsistait des remparts. Rentré au camp, je m’étendis sur mon lit et restai sans bouger pendant trois bonnes heures. KO moralement et physiquement. (Mon match avec la vie, G. Carpentier, Flammarion, 1954). Il sera décoré de la médaille militaire par Poincaré en présence de Nivelle.

Propagande : la reprise de Douaumont

Le retentissement de la reprise de Douaumont est énorme dans tout le pays et dans le monde entier, chacun écrivant l’histoire à sa façon.

À titre personnel, loin du fracas des combats, l’image que j’ai de la reprise du fort est celle du film La grande illusion. Son réalisateur, Jean Renoir, est à cette époque pilote dans l’aviation. Un des passages du film (voir l’extrait du film) nous donne à voir un spectacle réalisé par les prisonniers français et anglais, en présence de l’état-major allemand du camp. En pleine représentation, Jean Gabin monte sur la scène pour annoncer que Douaumont est repris ; tout le monde se fige sur place et entonne la Marseillaise, même les officiers anglais grimés en girls de cabaret !

Il me reste une dernière image à évoquer, celle du général commandant de brigade, tombé avant même le déclenchement de l’attaque.

Il est Saint-Cyrien, ancien du Prytanée Militaire comme moi et il s’appelle… Anselin avec la même prononciation phonétique que mon nom : c’est toujours avec un certain frisson que je l’entends cité le 11 novembre, à la veillée aux plaques dans mon ancienne école !

Cavalier, chef de la remonte nationale en charge de la gestion des chevaux militaires, il avait demandé à être affecté sur un commandement au front.

Le destin a voulu qu’il veille aujourd’hui sur tous les morts de Verdun : il est enterré au pied de l’ossuaire et sa sépulture domine les 16 412 tombes du cimetière militaire.

Quelles que soient les conditions climatiques, je ne manque jamais l’occasion  de me recueillir sur ce lieu, chaque fois que j’ai l’occasion de m’y rendre.

Photo : la dépouille du général Anselin

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